MASSACRE DE NGARBUH
La justice militaire au Cameroun avance à pas de tortue. Trois ans après le massacre, les victimes de Ngarbuh attendent toujours un procès équitable.
La prochaine audience du procès des éléments de forces de sécurité mêlés dans le massacre de Ngarbuh qui s’est ouvert le 17 décembre 2020, devant un tribunal militaire de Yaoundé, est prévue pour avoir lieu le 16 février 2023. Après plusieurs mois d’arrêt. C’est en novembre dernier que le procès était supposé reprendre. Si elle se tient effectivement, cette audience aura alors lieu, deux jours après le 3ème anniversaire du massacre. Toutefois, Human Rights Watch dans son communiqué du 14 février 2023 veut garder un mince espoir : « La reprise du procès cette semaine offre une nouvelle occasion de démontrer que le système militaire est capable de faire rendre des comptes aux auteurs de ces violations et de signifier aux violateurs potentiels que les crimes de ce type sont pris très au sérieux. Si cette occasion est manquée, le message aux familles des victimes sera que l’armée n’est pas intéressée par la justice ». C’est dire si cette lenteur remarquable et persistance suscite de graves préoccupations concernant la capacité du système de justice militaire à réellement rendre justice.
En effet, il y a trois ans, que l’organisation de défense des droits humain, Human Rights Watch avait révélé avec quelques semaines de décalage qu’un horrible massacre avait été commis au Cameroun, dans la région du Nord-Ouest. Les forces gouvernementales et des membres armés de l’ethnie peuls ont tué au moins 21 civils, dont 13 enfants et une femme enceinte, le 14 février 2020 dans le village de Ngarbuh. Un survivant, qui a été témoin du meurtre de tous les membres de sa famille, dont sept enfants, nous a confié : « J’ai vu les militaires abattre tous les membres de ma famille un par un alors qu’ils tentaient de s’enfuir. Ils ont d’abord tué notre mère. Puis, ils ont tué les enfants, dont les corps tombaient sur elle ». Le massacre de Ngarbuh est l’une des pires atrocités commises par les forces de sécurité du Cameroun depuis fin 2016 lorsque la crise a éclaté dans les régions anglophones du pays, où des séparatistes armés cherchent à obtenir l’indépendance pour la minorité anglophone de la population.
Le gouvernement a tout d’abord nié que ses forces de sécurité aient été responsables de la tuerie, et s’est lancé dans une campagne de dénigrement contre les organisations de défense des droits humains et les médias qui l’avaient révélée. Mais, à la suite de pressions internationales, le président Paul Biya a créé une commission d’enquête le 1er mars 2020. Le gouvernement a alors reconnu que ses forces de sécurité portaient une responsabilité dans le massacre, et a annoncé l’arrestation d’au moins deux militaires et d’un gendarme en juin 2020. Depuis que le procès du massacre de Ngarbuh s’est ouvert le 17 décembre 2020, devant un tribunal militaire de Yaoundé, il piétine. Pourtant, lorsqu’il avait été annoncé, il a été salué comme étant une avancée qui arrivait à point nommé et un espoir luisait de voir ce cas servir d’exemple afin « de briser le cycle perpétuel de l’impunité au Cameroun », déclare Lewis Mudge, le Directeur Afrique Centrale de Human Rights Watch (HRW). Mais depuis lors, peu de progrès ont été accomplis. Le porte-parole du collectif des avocats des victimes Me Richard Tamfu déplore le fait que les présumés coupables que l’enquête diligentée par la Présidence de la République avait identifié comme ceux avoir participé activement dans ce massacre comparaissent libres pour une affaire pénale de crime perpétré.
Cette lenteur persistante suscite de graves préoccupations concernant la capacité du système de justice militaire à réellement rendre justice et, si c’est le cas, quand. En outre, le fait que le procès se tienne à Yaoundé, à 450 kilomètres de Ngarbuh, aura pour effet de limiter, voire d’empêcher, l’accès et la participation des familles des victimes et des témoins potentiels. Le massacre de Ngarbuh n’est pas un événement isolé dans la crise sécuritaire qui sévit dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun depuis son déclenchement voici déjà sept ans. Ce massacre est loin d’être isolé. Avant et après le 14 février 2020, de nombreux civils ont été tués par les forces gouvernementales ou par les séparatistes. « Bien que d’autres tueries aient fait l’objet d’enquêtes, la seule constante au fil des ans a été l’absence d’efforts véritables d’établissement des responsabilités pour les violations croissantes des droits humains commises par les deux camps », indique Lewis Mudge, le Directeur Afrique Centrale de HRW.
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans le journal Le Canard Libéré du Cameroun
www.lecanardlibere237.com
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Belle initiative. Si ça peut faire sortir les jeunes de la délinquance en les réunissant au tour du sport. Vivement que les autres maires de ville emboite le pas; surtout que ce soit entretenu... Beaucoup de courage pour le travail abattu afin de maintenir le peuple informé.