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LA JUSTICE CAMEROUNAISE FERA-T-ELLE PREUVE D’INDÉPENDANCE ET D’IMPARTIALITÉ ?

PROCES BESTINVER CONTRE MTN ET CHOCOCAM


Mise en délibéré à l’audience civile et commerciale du Tribunal de Grande Instance du 18 juillet 2024, l’affaire opposant le consortium des sociétés Bestinver du richissime Ahmadou Baba Danpullo  à un consortium de sociétés de droit camerounais dont l’actionnariat serait détenu majoritairement par les actionnaires d’origines sud-africaines a été renvoyée au 23 du même mois en dépit des nombreuses exceptions soulevées par les conseils de MTN CAMEROON et Mobile Money Corporation pour solliciter un renvoi dans un délai beaucoup plus raisonnable.


Ahmadou Baba Danpullon capitaine d'industries, Patron du consortium Bestincer



L’affaire opposant les sociétés demanderesses : - Bestinver LTD South Africa, - Joburg Skys Scraper PTY Ltd, - Bestinver Prop 01 Proprietary Ltd, - Bestinver Cameroun aux sociétés défenderesses : - MTN CAMEROON, - Mobile Money Corporation (MMC), -  CHOCOCAM, et – Broadband SA était mise en délibérée depuis le 04 juillet 2024, à l’audience du 18 juillet 2024. Les Conseils de la société MTN Cameroon et de Mobile Money Corporation ont soulevé des exceptions aux fins de demander un renvoi à une date conséquente. Rappelant qu’ils ont fait une demande de rabat de délibéré, ce qui a conduit la  collégialité des juges à ouvrir les débats et de leur permettre de plaider avant de remettre la cause en délibéré à cette audience. A nouveau, ils ont fait une autre demande rabat de délibéré, ce qui les a permis  de déposer leurs conclusions et ils ont à nouveau demandé le rabat. Dans leurs moyens de défenses, ils soulèvent comme exceptions pour la demande de renvoi le fait qu’en cours d’audience les Conseils de la société CHOCOCAM ont déposés leurs conclusions ce qui nécessite de leur part des observations. Mais aussi, qu’il existe une procédure en appel au niveau de la Cours Suprême dont l’issue va nécessairement influencer le cours de la procédure pendante devant le Tribunal de Grande Instance (TGI) du Wouri. Il s’agit d’un appel sur l’assistance judiciaire.

Mais qu’elle n’a pas été l’étonnement des Conseils de MTN CAMEROON et MMC de voir la présidente du TGI à remette l’affaire à nouveau en délibéré pour le 23 juillet 2024, soit cinq jours plus tard parmi lesquels deux jours non ouvrables. Ceci à la satisfaction des Conseils des sociétés demanderesses qui ont déclaré qu’ils ne trouvaient plus la nécessité de répondre aux conclusions des Conseils des sociétés défenderesses. Estimant qu’ils avaient suffisamment avancé des éléments soutenant leur demande. Tout en soulignant qu’à plusieurs reprises cette affaire a été renvoyée au fond de manière qu’il ne soit plus normal qu’on puisse solliciter un renvoi pour faire des observations sur les conclusions. Pour les conseils de MTN CAMEROON et MMC, cette procédure plonge les parties dans un imbroglio judiciaire. Profitant du dépôt de leurs conclusions, les Conseils de CHOCOCAM en ont profité pour plaider et de souligner d’emblée que : «Nous nous retrouvons dans une affaire rocambolesque». Faisant remarquer qu’en l’espace de trois semaines, à partir du 22 septembre 2022,  trois ordonnances ont été signées pour la saisie des comptes des sociétés défenderesses afin de recouvrer une créance d’un montant global de 243,760 milliards de FCFA. Ayant cru au départ à une erreur, ils vont se rendre compte «qu’il ne s’agit pas d’une erreur, mais d’une organisation de spoliation de l’ensemble de leurs ressources».

Mitwa Ng’ambi, DG de MTN Cameroon


Dans leur plaidoirie, les Conseils de CHOCOCAM vont relever que cette société créée en 1977 par l’Etat du Cameroun est une société de droit camerounais et ne reconnaissait avoir aucun lien avec les sociétés ayant procédé à la saisie de ses comptes. De dénoncer le fait que le juge du contentieux qu’ils ont saisi pour l’annulation de cette saisie des comptes dit qu’il n’est pas compétent d’une décision qu’il a prise en amont. Mais aussi que le juge de référé qu’ils ont saisi depuis deux ans aujourd’hui n’a jamais cru bon de donner suite au dossier. Que jusqu’au stade actuel de la procédure, personne n’arrive à leur dire la créance sur laquelle ils se sont fondés pour procéder à ses saisies. «Voilà la situation que nous avons à faire en ce moment» font-il remarquer. Avant d’indiquer que les sociétés demanderesses ont saisi cette juridiction pour demander de leur condamner afin d’avoir accès aux fonds cantonnés et même de procéder à des saisies complémentaires. Mais de manière péremptoire, ils déclarent qu’elle est vouée à l’échec dans une situation normale… «Il serait inimaginable qu’on puisse être condamné sur la base de l’action qui a été engagée», clament-ils. A cet effet, ils soulèvent quatre (04) exceptions : - le non-paiement par les sociétés demanderesses, de droits sud-africains avec leurs sièges installés dans ce pays, du montant correspondant à la demande pour permettre en cas de condamnation de faire face aux dommages et intérêts ; - La non-paiement par les sociétés demanderesses d’au moins 1% du montant leur prétention ; - la non existence de la preuve de la constitution conseils des sociétés demanderesses par les personnes légales et légitimes lorsqu’on sait qu’elles sont toutes soit en liquidation judiciaire soit en redressement judiciaire.

Les parties jettent leurs dernières cartes dans la bataille

Dans le cas d’espèce seul, le syndic des liquidateurs peut représenter ses sociétés. Et ils ont constitué un cabinet d’avocats pour dire qu’ils ne se reconnaissant pas dans les actions judiciaires engagées au Cameroun. De manière plus simple, rappelons que  les quatre (04) sociétés sud-africaines détenues par le richissime homme d’affaire Ahmadou Baba Danpullo  aveint  obtenu des crédits auprès des banques en Afrique du Sud. Des dettes qu’elles n’ont pas remboursées. Par décision de la justice sud-africaine, elles ont été toutes mises en liquidation. Ahmadou Baba Danpullo  estime qu’il a été victime d’abus, de spoliation, et de xénophobie. En réplique, il a engagé sur le sol camerounais une mesure de rétorsion à certains investissements sud-africains connus. A cet effet, il en a fait une histoire de patriotisme économique mais juridiquement inédite. En arguant que la First Rand Bank Ltd Afrique du Sud est une filiale de la First National Bank du même pays. Et cette dernière aurait parmi ses actionnaires un Fonds d’investissement Sud-africain qu’on appelle la Public Investment Corporation Ltd. Et que ce fonds serait actionnaire de MTN International. Et cette dernière est actionnaire de MTN CAMEROON qui est aussi actionnaire de Mobile Money Corporation. C’est le même raisonnement qui est tenu contre la CHOCOCAM. En soutenant que Public Investment Corporation Ltd est actionnaire de Bird Brand qui a des actions à CHOCOCAM.


Kamau Polucarp Igathe, PCA Chococam


Pour démontrer ce lien d’actionnaires, il a été produit un document non authentifié que le conseil de CHOCOCAM qualifie de papier volant que tout le monde peut saisir dans la première bureautique du coin. Nos enquêtes menées indiquent que Public Investment Corporation Ltd n’est pas actionnaire de MTN CAMEROON. Qui a deux actionnaires principaux : MTN Inc et Broad Band SA. A son tour, Mobile Money Corporation a deux actionnaires, MTN CAMEROON et Broad Band SA. Et par conséquence, il n’y aurait aucun lien ni avec Bestinver ni avec les banques sud-africaines First Rand Bank et First National Bank. On est alors à se demander, comment comprendre que les dirigeants des quatre sociétés sud-africaines en faillite parce que de nationalité camerounaise peuvent estimer qu’une prétendue faute commise par la First Rand Bank doit être payé par MTN CAMEROON, Mobile Money Corporation, Broadband SA qui n’a pas d’intérêts connus en Afrique du Sud et CHOCOCAM ? On se souvient que Le 8 septembre 2023, la BEAC a saisi le Ministre des Finances camerounais pour dénoncer les saisies des comptes des sociétés demanderesses et la contrainte faite aux banques de s’exécuter. Dans la même veine, le président du GICAM, alors en pleine phase de mutation, Célestin Tawamba avait dans un communiqué signé le 9 décembre 2023, déploré cette procédure judiciaire qui est prise en méconnaissance des règles édictées par la COBAC et le régulateur bancaire dans l’espace CEMAC. Même sur le plan diplomatique, on va enregistrer la visite au Cameroun de la Ministre des Relations Internationales et de la Coopération de l’Afrique du Sud, SE Naledi Pandor. Et il s’en est suivi un communiqué officiel qu’elle a signé le 13 juin 2023 intitulé : «Le Ministre Pandor exprime sa préoccupation concernant le traitement des entreprises sud-africaines au Cameroun». Cette affaire qui a des conséquences graves sur le tissu socio-économique national parce que ces entreprises emploient directement plus de 1000 Camerounais et près de 300 000 autres indirectement à travers les différents prestataires



Mathieu Nathanaël NJOG



Article publié dans le journal Le Canard Libéré du Cameroun


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