ACTIS RESIDUELS DE L’EX-ONPC
Une ordonnance de référé exécutoire par provision sur minute et avant enregistrement, rendue le 19 avril 2024, sous astreinte de 1 000 000 de Fcfa par jour de retard ordonne l’expulsion du Port Autonome de Douala des immeubles de l’ex-Office Nationale des Ports du Cameroun. Cette décision curieuse et inextricable va en contradiction avec le décret n°2019 du 24 janvier 2019 portant réorganisation du Port Autonome de Douala.
Le 23 avril 2024 avec l’assistance des éléments de la Gendarmerie nationale l’huissier de justice de l’Etude de Me Kougang est allé pour exécution de la décision du Tribunal de Première Instance (TPI) de Douala-Bonanjo, ordonnant l’expulsion du Port Autonome de Douala (PAD) des immeubles de l’ex-ONPC (Office National des Ports du Cameroun) par ordonnance de référé exécutoire par provision sur minute et avant enregistrement, rendue le 19 avril 2024, sous astreinte de 1.000.000 de Fcfa par jour de retard. Il va se heurter à l’opposition de sieurs Jacques Yepmou et Cyriaque Bomo, responsables de la Régie Immobilière du PAD, bénéficiant de l’appui des éléments de la Marine Nationale assurant la sécurité désormais des lieux. L’huissier et les éléments de Gendarmerie se sont retirés conformément à la loi et ont dressé un procès-verbal comme il est d’usage en pareil cas. Échec pour le Cabinet Lazard Atou, gestionnaire légal des actifs résiduels de l’ex-REGIFERCAM, l’ex-ONCPB et surtout de l’ex-ONPC jusqu’en janvier 2019. Le PAD a fait appel à cette décision à la Cour d’Appel du Littoral. Sachant qu’en outre le 02 juin 2021, le SG/PR a signifié au DG du PAD l’accord du Président de la République pour engager sans délai les procédures de restitution des actifs résiduels de l’ex-ONPC au PAD. Les protagonistes devront comparaitre le 10 mai 2024.
En effet, à la faveur du décret n°2019 du 24 janvier 2019 portant réorganisation du Port Autonome de Douala, la 110ème session du Conseil d’administration du 30 mai 2023 va autoriser le Directeur général, Cyrus Ngo’o, à créer la Régie du Patrimoine Immobilier pour une gestion rentable et efficace de l’important patrimoine immobilier du portefeuille du PAD. La création de cette Régie et la prise de fonction de ses dirigeants le 23 août 2023 venait donc consacrer la prise en main ferme de la gestion des actifs résiduels de l'ex-Onpc, après le transfert effectif, comme le stipule l’article 22 en ses alinéas 1 et 2 du décret du 24 janvier 2019. Depuis lors, la Régie du Patrimoine a recensé tout le patrimoine immobilier et a récupéré tous les actifs résiduels de l’ex-ONPC. Appliquant des arrêtés N°1529 et 1530 du 16 novembre 2021 du Ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières (MINDCAF), Henri Eyebé Ayissi rétrocédant en application des dispositions de l’article 22 de décret n°2019 du 24 janvier 2019 portant réorganisation au PAD les actifs résiduels de l’ex-ONPC, les biens constitutifs des actifs résiduels situés à l’intérieur de le périmètre du domaine portuaire matérialisés par 25 titres fonciers et d’un terrain domanial situé dans l’Arrondissement de Douala Vè au quartier Bépanda-Bassa, plus connu sous l’appellation «Cité du Port». Lequel appartenait à l’ex-Onpc et était occupé de manière irrégulière par la Communauté Béedi.
Le Cabinet Atou a un regain d'espoir pour garder la main
Une communauté autochtone pourtant installée très loin, entre la cité des palmiers et l’hôpital général. Une extrapolation qui va obliger le MINDCAF de retirer les 10 titres fonciers attribués à cette pour les intégrer dans l’assiette foncière du Titre foncier N°4038 de l’ex-ONPC. En somme, le PAD se retrouve ainsi repreneur d’un patrimoine immobilier de 23 propriétés dont 22 bâties dans la ville de Douala et un (1) non bâti dans la ville de Yaoundé. Pour une superficie globale de 20ha 77a 39ca. Lorsqu’on passe à Bépanda omnisport, nous pouvons très vite remarquer les panneaux qui délimitent ce patrimoine avec des messages indiquant que c’est le patrimoine du PAD conformément au TF N°4038. C’est le fruit d’un processus mené de manière claire et légale. Qui va démarrer avec une correspondance adressée le 06 juillet 2022 par le Ministre des Finances, Louis Paul Motazé à Lazare Atou, administrateur du Cabinet éponyme. Avec en objet : «Arrêt des activités du cabinet Atou concernant la sauvegarde et la gestion des actifs résiduels des ex Rncf, Onpc, Oncpb.» Et il lui notifiait «la fin de votre mission dans le cadre de la gestion et la sauvegarder des actifs résiduels des ex Rncf, Onpc et Oncpb.»
L’ex-gestionnaire des actifs résiduels des défuntes sociétés d’Etat essaie depuis de s’accrocher avec quelques soutiens tapis dans le gouvernement. C’est ainsi qu’en juillet 2021, Lazare Atou dépose sous pli confidentiel N°429/CF/CAB/ME/MJ/GDS/DIRECTION/DAPG, auprès du Ministre d’Etat, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux une dénonciation contre Ferdinand Ngoh Ngoh et Cyrus Ngo’o pour détournement de biens publics en coaction et complicité intérêt et abus de fonction. Il s’agit ni plus, ni moins, d’une opération visant à interrompre le processus de récupération des biens de l’ex-Onpc qui revenaient au PAD. Malheureusement le processus avait déjà été enclenché comme en témoigne le communique du 5 novembre 2021 de la Ministre Déléguée à la Présidence de la République chargée du Contrôle Supérieur de l'Etat (CONSUPE), Mbah Acha Rose Fomundam qui suspend le «truculent» Lazare Atou de signature et de toute prise d’acte en rapport avec la liquidation des sociétés suscitées. Surtout que dans une décision du 20 avril 2023, le Conseil de discipline budgétaire et financière (CDBF) du Conseil Supérieur de l’Etat (CONSUPE) va le condamner à verser plus de 12, 8 milliards de FCFA au Trésor public pour des fautes de gestion commises dans le cadre de la gestion de ces actifs résiduels sur la période 2006-2021.
Le processus de restitution des actifs résiduels
Le CONSUPE lui reproche le «non-respect des exigences en matière de reporting et de contrôle, l’aliénation des immeubles de l’ex–Oncpb, sans qualité ni autorisation, la minoration des valeurs réelles des superficies de parcelles de terrain, objet de cessions, l’utilisation par le mandataire des biens du patrimoine résiduel à titre gratuit et le non-reversement de la quote-part sur les recettes locatives». Il va aussi s’en suivre la suspension de la vente par le Cabinet Atou de plusieurs patrimoines bâtis et non bâtis. Le 2 juillet 2021, le SG/PR répercute au MINDCAF, les «très hautes instructions du Président de la République » lui demandant de «retirer le titre foncier N°1023/W établi par le Cabinet Atou au nom de l’ex-ONCPB sur un terrain du domaine public portuaire; prendre en liaison avec le Ministre des Finances les mesures nécessaires relevant de sa compétence en vue, d’une part, de la restitution des actifs résiduels de l’ex-ONPC au Port autonome de Douala et, d’autre part, de reverser dans le domaine privé de l’État les terrains appartenant aux ex-RNCF et ONCP». C’est avec stupéfaction qu’on peut constater que les jurés du TPI de Douala-Bonanjo peuvent aller à l’encontre du Décret présidentiel N°96/23 du 1er octobre 1996 portant : «Annulation des actes de ventes et de compensation de certains terrains domaniaux de Douala » parmi lesquels ceux des actifs résiduels suscités. Ainsi, le 7 mai 2021 le SG/PR dans une correspondance adressée au MINFI, demande d’instruire au Cabinet Atou de mettre un terme à son projet de vente à la CUD d’une propriétaire foncière de l’Ex-ONPC d’une superficie de 12ha 34a 14c à un montant de deux (02) milliards de FCFA. Mais des indiscrétions font état d ce que Lazard Atou est détenteur d’une correspondance manuscrite du Président de la République datant de 2006 dans laquelle, il attribue la gestion des actifs résiduels au Cabinet Atou. Ce qui ferait pencher la balance des juges.
Mathieu Nathanaël NJOG
Senior Journalist / Leader syndical.
Article publié dans le journal Le Canard Libéré du Cameroun
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