REFORME DU SYSTEME ELECTORALE
Ayant fait son cheval de bataille dans la promotion de la démocratie, la gouvernance, l’accès aux droits et l’éducation citoyenne, l’Ong Un Monde Avenir monte à nouveau au créneau en regroupant les Organisations de la société civile camerounaise autour d'un projet d'une lettre ouverte adressée au Président de la République, Paul Biya afin de lui rappeler l'urgence d'une réforme du système électorale. Elle fait suite à un plaidoyer qui vient d’obtenir plus de 125% des signatures escomptées.
La Président de la République par courrier express d’une agence de colis postaux a reçu le 2 avril 2024 la lettre ouverte envoyée par une dizaine d’organisations de la société civile camerounaise regroupée à l’initiative de l’Ong Un Monde Avenir (1MA). Etonnées de ce que les travaux de la session parlementaire de mars 2024 tirent allégrement à sa fin, sans qu’on évoque la réforme électorale qu’elle qualifie de préoccupation majeure en cette année pré-électorale des grandes joutes de 2025, alors qu’elle vienne d’adresser en prélude à cette première session annuelle du parlement à Paul Biya, Président de la République les résultats d’une pétition numérique et physique, qui, en 21 jours (du 14 février au 5 mars 2024) a obtenu 5023 signatures des citoyens camerounais de l’intérieur de de la diaspora afin d’appeler à la nécessité d’une réforme du système électoral dans la perspective des élections de l’année prochaine vers lesquels le Cameroun s’achemine à grand pas. «Alors que la représentation nationale réunie depuis le 05 mars pour sa première session annuelle s'apprête à clôturer ses activités parlementaires, nous nous faisons le devoir citoyen de vous saisir à nouveau, cette fois, par lettre ouverte au public à l'effet d'attirer votre haute attention au sujet de la nécessité d'apporter les réformes nécessaires à notre système électoral globalement reconnu comme inefficient, pour des élections crédibles et non contestées», peut-on lire.
Ces actions citoyennes ne sont pas les premières. L’Ong Un Monde Avenir et ses partenaires associatifs avaient déjà adressé le 10 avril 2019, une lettre ouverte au Parlement, pour exprimer leur indignation de ne pas voir inscrire à l’ordre du jour de la première session annuelle, un sujet lié à l’une des crises postélectorales les plus aiguës qu’avait connu le Cameroun au sortir des élections présidentielles de 2018. « Comment ne pas s’offusquer que vous n’ayez pas trouvé urgent de mettre à l’ordre du jour, notre arsenal juridique et institutionnel électoral au vu de ladite crise post-électorale qui, sévissant depuis plusieurs mois, est consécutive à la faible confiance des acteurs au système électoral en vigueur ? », pouvait-on lire dans cette lettre ouverte. N’ayant pas connue une suite favorable, ils avaient cette fois adressé, le 22 juillet 2019, une autre lettre au Président de la République, Paul Biya, dans laquelle sa responsabilité en tant que garant de la paix sociale et la cohésion nationale, à assurer un cadre juridique et institutionnel qui garantisse la transparence et l’équité électorales au Cameroun avait été mis en exergue.
Chapelet d’imperfections
Fort est de constater disent-ils que tous ces problèmes mentionnés au sortir de l’élection présidentielle de 2018 ainsi que des élections législatives et municipales de 2020, sanctionnés à chaque fois par des vives contestations de la part des candidats et partis politiques qui dénonçaient les imperfections du système électoral, restent d’actualité à nos jours. Ils soulignent que le code électoral actuel y compris les aspects constitutionnels relatifs aux élections, comporte plusieurs éléments conflitogène et/ou qui violent les principes démocratiques. Ils citent entre autres : - La répartition inéquitable des sièges aux élections municipales, législatives et régionales qui affecte le vote égalitaire ; - La désignation non consensuelle de l’autorité et le juge électoraux par le Président de la République, par ailleurs chef d’un parti politique concurrent ; - La non maitrise du fichier électoral par l’ensemble des concurrents politiques ; - La primauté d’un procès-verbal sur les autres ; - La déresponsabilisation de l’autorité électorale à la dernière phase du processus électoral ; - les responsabilités d’ELECAM s’achevant au niveau de la Commission communale où elle assure la présidence, les Commissions départementales, régionales et nationales étant présidées par d’autres acteurs ; - L’interdiction faite à ELECAM de publier les résultats provisoires, notamment pour les élections législatives et présidentielle. Les organisations de la société civile font remarquer que les chiffres diffusés par Elecam laissent courir des suspicions sur l'intégrité du fichier électoral.
Relevant que cela est renforcé avec une note rendue publique par ELECAM le 10 janvier 2024 et présentant le nombre total des inscrits au 31 décembre 2023 (après nettoyage), qui est de 7 361 875 personnes. Or, ils rappellent qu’au 31 décembre 2018, le nombre total des inscrits était de 6 667 754 personnes. Soit une augmentation de 694 121 personnes inscrites en 5 ans. Très insignifiant pour le potentiel électoral du Cameroun qui se chiffre à un peu plus de 11 millions d’électeurs. Obligeant les acteurs politiques et associatifs de relever que la non diffusion de la liste nationale des inscrits tel que prévue par le Code électoral démontre une certaine opacité du fichier électoral. Et d’estimer qu’avec des équipes des bénévoles déployées sur le terrain par les partis politiques et les organisations de la société civile, ELECAM ne peut pas avoir inscrit seulement en moyenne 138 824 personnes par an depuis 5 ans (après la présidentielle de 2018), soit 13 883 personnes par région et par an, 58 personnes par jour et par région. Curieusement, entre 2012 et 2013, période de la refonte électorale, ELECAM avait réussi à inscrire un peu plus de 5 millions de citoyens camerounais en moins de huit (08) mois. Alors, ils s’interrogent : «Comment comprendre que depuis lors, elle n’arrive pas à atteindre le même chiffre depuis plus de dix (10) ans ? ». Et de conclure par cette supplication : «L’attachement au Cameroun nous commande, où que nous soyons, d’œuvrer pour des élections sécurisées c’est-à-dire, des élections encadrées par des lois consensuelles et dépouillées d’aspects pouvant servir de prétexte à l’ouverture de conflits».
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans le journal Le Canard Libéré du Cameroun
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