FORET D’EBO’O
Les Banen de la région du Littoral ont organisé un meeting de remerciement au Chef de l’Etat, S.E. Paul Biya pour avoir autorisé la signature, le 27 avril 2023 d’un décret portant classement au domaine privé de l’Etat d’une portion de la forêt d’Ebo’o en Unité Forestière d'Aménagement. Signant ainsi la remise de cette forêt aux communautés autochtones qui y ont été chassées depuis près de 70 ans, en dépit d’une opposition farouche des Ongs internationales qui manœuvraient pour en faire un parc national.
Les filles et fils Banen de la région du Littoral sont partis des quatre coins du Cameroun pour se retrouver le samedi 17 juin 2023 à Douala, au terrain de football de PK 11, où ils ont tenu un grand meeting de remerciement qui s’est achevé par la signature d’une motion de soutien au Président de la République : « Nous sommes réunis ici pour dire merci à S.E. Paul Biya, suite au double message que nous avons reçu du Préfet du département du Nkam et du Préfet de la Sanaga-maritime. Message selon lequel le Président de la République validait nos choix. A savoir, nos options de retour dans notre terroir ancestral et de nous donner les moyens de leur mise en œuvre », déclarait l’Honorable Moth Samuel, ci-devant le président du Comité de Développement de la Forêt d’Ebo’o dont une partie importante se situe dans les Arrondissements de Yingui (51 816 ha) sur les 68350 ha concernés. C’est ainsi que quelques jours plus tôt, les Préfets des départements du Nkam et de la Sanaga-maritime ont respectivement réuni les populations autochtones bénéficiaires dans lesdits arrondissements pour leur faire l’annonce de la bonne nouvelle et leur donner les éclairages nécessaires. C’est alors que le 15 juin, le Comité Développement de Massok, bénéficiaire de 16569ha va organiser un meeting de remerciement et de signature d’une motion de soutien au Président Paul Biya. Le 17 juin les Banen vont prendre le relais avec l’organisation d’un meeting similaire à tout point avec l'onction des quatre chefs supérieurs de cantons de Yingui et une vingtaine de chefs de villages qui ont fait le déplacement.
Le Décret N°2023/01630/PM du 27 avril 2023 portant « Classement au domaine privé de l’Etat d’une portion de forêt de 68 385 hectares en Unité Forestière d'Aménagement dénommée UFA 07 006 » sonne comme un acte fort du Président de la République, Paul Biya qui favorise le retour en toute quiétude des populations autochtones vers leurs terres ancestrales où ils ont été chassés par l'administration coloniale pendant les années de lutte pré et post indépendance des nationalistes. Et pour cause, cette forêt, réputée comme l’un des principaux foyers de résistance connut une opération de nettoyage de toute âme vivante par l’administration coloniale. Ce qui avait entraîné un dépeuplement total des populations autochtones parce que déclarée : « Zone de Pacification (ZOPAC) ». Conséquence, de suite d’une première expropriation, depuis près de 70 ans, il n’y a pas une âme qui vive dans la forêt d’Ebo’o. La deuxième, la plus lourde expropriation est celle de 2006 lorsque les Ongs internationaux engagent un processus de classement de cette forêt en parc national. C’est alors que toutes les populations autochtones de cette forêt vont exprimer leur frustration d’avoir été mises à l’écart et obtenir que le gouvernement fasse volte-face et décide en 2020 de la classer en Unité de Gestion Forestière.
Soulagement des populations autochtones
Les élites se divisent sur ce classement et la société civile entre dans la danse. Le Gouvernement se rétracte à nouveau en 2021 et demande l’initiation d’un processus plus inclusif de planification de l’utilisation de ses terres. Ce qui aboutit avec ce dernier décret de 2023. Cette forêt s’étendant sur une superficie de 1400 Km2 (environ 141 706 hectares) qui se situe à cheval entre la région du Littoral (à travers l’Arrondissement de Yingui, dans le département du Nkam, et l’Arrondissement de Massok-Songloulou dans le département de la Sanaga Maritime) ; et la région du Centre (à travers l’Arrondissement de Ndikiniméki dans et le département du Mbam et Inoubou). Ainsi déportées, les communautés autochtones chassées de leur zone naturelle de vie vont plonger dans une errance où elles vont se trouver éparpillées sur le territoire national en mal de repère et sans grande dignité jusqu’à ce jour. Les témoignages sont édifiants. Le Chef Supérieur Canton Ndicbiakat, S.M. Gaston Dipita, déplore : «Depuis, 20 ans que je suis Chef supérieur de Canton Ndicbiakat, je suis en divagation. Je ne suis pas dans mon territoire de commandement. Or, le décret de 1977 dit qu’’un chef, c’est un territoire et une population. J’ai des chefs de village qui ne sont pas installés dans leur village. J’ai perdu un de mes chefs de villages, mais on l’a enterré à Douala. Depuis 1960, mon territoire est où alors ? ».
Pour sa part, le Chef supérieur du Canton Ndicnanga, S.M. Jean Paul Singha de poursuivre : «Cette décision du Chef de l’Etat, Paul Biya, est une bénédiction que nous les Banen avons reçu. Car, elle nous offre une opportunité unique de faire un retour sur nos terres natales. Nous ne devons pas simplement lui adresser une motion de soutien mais des remerciements infinis ». Et le Comité de Développement de lever tout équivoque : «Contrairement à tous ceux qui présentent l’UFA comme des exploitations forestières, il faut dire que l’UFA, c’est la rencontre entre un forestier, un partenaire et une communauté. Sans communauté, il n’y a pas d’UFA parce qu’il faudrait que nous signons un cahier de charge qui est comme un acte de mariage entre l’exploitant et nous », précisera Yannick Patrick Bagnack. Toutefois, le président du Comité de Développement des Forêts d’Ebo’o, Samuel Moth va lancer une main tendue aux Ongs internationales qui s’opposent à cette UFA. «Nous rentrons chez nous pas pour faire une guerre fratricide. Nous ne rentrons pas pour nous en prendre à la biodiversité, si nos aïeux sont restés dans cette forêt, c’est parce qu’ils avaient de très bonnes raisons. Nous souhaitons que les Ong travaillant dans cette biodiversité là nous accompagnent. Nous sommes preneurs et entièrement ouverts sur le sujet. Mais pour rien au monde, on n’expliquera pas à un peuple errant et qui a ferraillé pour retrouver sa dignité que les gorilles et les plantes sont au-dessus de l’être humain».
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans le journal Le Canard Libéré du Cameroun
www.lecanardlibere237.com
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