BUSINESS DEVELOPMENT FORUM
La Commercial Bank a organisé le 25 mai 2023 à Douala, la 4è édition du Business Development Forum sous le thème : « Nouvelle réglementation de change : 03 ans après en zone CEMAC, bilan et outils d’optimisation ». Ce networking était une occasion pour les opérateurs économiques et grandes fortunes et la banque de faire l’état des lieux de sa mise en œuvre. Afin de mettre en exergue les potentielles solutions, partant des avantages et difficultés opérationnelles rencontrées.
L’économie camerounaise est essentiellement une économie de comptoir des produits manufacturés. Au Cameroun, c’est environ, 8 250 opérations d’importations de marchandises par mois, soit 99 000 opérations d’importations de marchandises par an. 78,8% se font par voie maritime et 21,2% par voie aérienne. Ainsi, les importations ont représenté en 2021 un montant de 3871,4 milliards de FCFA et les exportations 2021: 2392,7 milliards de FCFA. Présentant une balance commerciale fortement déficitaire. Une situation qui dure depuis 2014 avec la chute des 52% des prix de pétrole sur le marché mondial. Selon la Gestion des réserves internationales de la CEMAC, entre juin 2014 et décembre 2016, les réserves officielles sont tombées à 4,2 milliards de dollars USA (environ 2 250 milliards FCFA) en fin 2016, soit près de deux (2) mois de couverture d’importations futures. A cela, il faut ajouter que de nombreuses banques et de nombreux résidents semblent ne pas respecter certains volets de la réglementation des changes. Conséquence, le rapatriement des recettes d’exportation est très faible, en particulier par les compagnies pétrolières, et les demandes de devises adressées par les banques à la BEAC ne sont souvent pas suffisamment motivées. Les hommes d’affaires paient au prix fort cette situation. Plusieurs entreprises de divers secteurs se plaignent de longs délais de traitement des opérations de transferts en règlement des transactions courantes. Ce qui a fait prospérer des insinuations tendancieuses allant jusqu’à craindre une dévaluation qu’on annonce avec certitude chaque année depuis ces années. Le Business Development Forum (BDF) qu’organise régulièrement la Commercial Bank qui se veut une plateforme d’échanges qui s’inscrit dans la politique de la banque d’accompagner et de fidéliser sa clientèle et des grandes fortunes était le 25 mai 2023 à l’hôtel Krystal Palace à sa 4é édition. Elle était placée sur le thème : « Nouvelle réglementation de change : 03 ans après en zone CEMAC, bilan et outils d’optimisation ».
Récriminations
Cette 4è édition a été très courue par les chefs d’entreprises en personne, venus exprimer leur ras-le-bol face aux préjudices énormes qu’ils subissent du traitement lent de leurs opérations de virements, non sans faire le procès de la Banque centrale afin d’appeler à un traitement plus rapide et diligent qu’ils requièrent des fonctionnaires de la BEAC. «Comme l’a dit tous les autres chefs d’entreprises, nous ne dormons pas parce que nous devons faire chaque jour le tour de toutes des banques à la cherche des ordres de virements», déclarera Ndonsop, patron d’entreprise. Et d’autres de s’offusquer : «Nous avons recruté des cadres spécialisés pour gérer ces opérations, mais finalement, c’est toujours aux DG que nous sommes de nous mettre en quatre pour trouver la solution à travers nos relations dans les banques. Ce n’est pas normal. Même les banques commerciales n’arrivent pas à gérer nos intérêts auprès de la BEAC ». Ils estiment même avoir subi des préjudices irréparables. «Les torts qui sont causés aux acteurs économiques que nous sommes sont énormes, parce que comme l’a dit M. Emmanuel Wafo, gagner la confiance d’un partenaire économique en occident lorsque tu es africain noir et qu’il te mette, un million d’euros (environ 654 millions de francs CFA) de ligne de crédit et que tu viennes à l’expliquer que tu lui as déposé un virement depuis un mois et le virement n’est pas passé, vous pouvez tous lui dire, la BEAC a fait ceci à ou cela, il retient tout simplement que vous n’êtes pas sérieux».
Last but not the least. « Il y a des instruments du commerce international qui sont extrêmement sensibles et qu’il faut que le personnel de la BEAC comprenne que cela s’impose à eux. Notamment qu’ils ne peuvent pas prendre des décisions qui vont au-dessus de la lettre de crédit. Lorsqu’on donne à un fournisseur une lettre de crédit irrévocable et confirmée et qu’au moment où lui, il a rempli toutes ses obligations, il ne reçoit pas son paiement cela pose des dommages énormes », interpelle un des chefs d’entreprises participants. Et d’ajouter : « L’année dernière, j’ai perdu un fournisseur français, à cause de la lettre de crédit. Il avait rempli tous les engagements et la lettre de crédit a pris un mois pour être payée à cause des problèmes de changes. Aujourd’hui, il refuse de me livrer. Je suis obligé de perdre des millions de francs CFA pour envoyer des ingénieurs au Maroc pour être reformer aux mêmes choses. Tout ceci à cause de l’incompréhension des fonctionnaires de la BEAC ». Face à cette levée de boucliers contre les banques commerciales et contre la Banque centrale, le DG de la Commercial Bank, Léandre Djummo a tenu à lever quelques équivoques. «Je vous rassure qu’il n’y a pas une question de manque de devises. Tout comme, il n’y a aucune dévaluation qui est annoncée et lorsqu’elle devra arriver, elle va nous tomber sur la tête comme un couperet ». Pour l’expert Babissakana du Cabinet Prescriptor, il ne fait pas de doute que la BEAC doit avoir une célérité d’exécution la plus élevée possible dans les opérations de transferts parce qu’elle en a les moyens de se doter la technologie qui va avec. Mais, il va insister pour conseiller aux opérateurs économiques de s’approprier la nouvelle réglementation. Même si, elle est rigoureusement. Et soutient qu’il n’en sera pas autrement. Ce d’autant plus que «La question du rapatriement des capitaux détenus par les résidents non bancaires de la CEMAC demeure entière». Et d’ajouter : « Je vous ai montré qu’il y a des personnes qui continuent à sortir l’argent frauduleusement. Ce qui oblige les autorités institutionnelles à prendre des mesures draconiennes de contrôle».
Pistes de solutions
Toutefois, il a conseillé aux hommes d’affaires d’apprendre à faire valoir le rapport de force dans les cas d’incompréhension. Et cela passe par les organisations professionnelles dans lesquelles il faut adhérer. « Le discours qui passe pour une Banque centrale c’est la robustesse de celui qui parle. Si vous voulez évoluer en électron libre vous ne serez jamais écoutés et ne pourrez pas faire boucher la moindre ligne. Même les banques pour qu’elles soient écoutées, il faut que ce soit par la voix de l’Apeccam. Si c’est chaque banque qui écrit à la BEAC, elle n’obtiendra aucune réponse. Or, dans votre cas, si c’est le GICAM qui porte les préoccupations de ses membres, la réponse sera rapide », insistera Babissakana. En revanche, Emmanuel Wafo, président de la Commission économique et Développement de l’entreprise au GICAM qui va porter la voix des opérateurs économiques, va faire remarquer que la nouvelle réglementation a apporté dans ses réformes des procédures complexes et sans cesse en évolution qui obligent de s’ajuster. Car les procédures sont contraignantes et sans cesse évolutive. Caractérisées par une augmentation de la liasse de documents à produire pour les demandes de transferts. Et le comble, c’est que la Banque centrale brille par une communication défaillante. Toute chose qui concourt à une appropriation difficile de cette nouvelle réglementation. Qu’à cela ne tienne, il s’est permis de proposer quelques exquises de solutions : - Faire des allocations automatiques de devises pour ces entreprises et pour ces opérations ; - Mettre en place des circuits de traitement préférentiels ; - Mettre en place un dispositif permettant de pallier les cas de perturbation de la plateforme @transfert ; - relever le quota de devises mis à la disposition des banques commerciales. Et soutenir malgré tout qu’«il n’y a pas de solutions idoines dans le souci d’améliorer la relation et la possibilité de faire les transferts». Pour lui, la vraie question est de savoir qu’elle est la vraie position de la BEAC vis-à-vis des entreprises. Parce qu’«il faut qu’elle change de paradigme et comprenne qu’elle est au service de l’entreprise en étant moins condescendant dans un environnement économique qui nous oblige à nous adapter aux réalités ». Et le DG de la Commercial Bank de conclure : « Ne vous découragez pas, la Banque Centrale n’a aucun intérêt de scier la branche sur laquelle, elle est assise. Car, si les économies s’effondrent la Banque centrale n’existera pas. Les fonctionnaires de la BEAC ne sont pas arrogants, c’est la plateforme numérique qui est encore instable».
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans le journal Le Canard Libéré du Cameroun
www.lecanardlibere237.com
Laisser un commentaire et Abonnez-vous .
Comments