EGLISE EVANGELIQUE DU CAMEROUN
Le culte en langue française, du dimanche 13 octobre 2024 à la paroisse du centenaire de l’Eglise Evangélique du Cameroun à Douala, a connu une effervescence particulière avec la visite du Révérend Justin Njikeu, ancien Pasteur principal de cette chair. Installé en Pennsylvanie aux Etats-Unis depuis cinq ans, il revient au Cameroun et rend visite à la communauté religieuse qu’il avait quitté dans des conditions orageuses.
Revenu au Cameroun pour des raisons familiales, notamment pour l’organisation des obsèques de son frère ainé (son père) qui l’avait élevé après le décès de son papa, parti alors qu’il était adolescent, le Révérend Justin Njikeu, ancien Pasteur de l’Eglise Evangélique du Cameroun (EEC) va passer le culte dominical du 13 octobre 2024 à la paroisse du centenaire. Qui l’eût cru ? Alors, Pasteur principal de cette paroisse mère de l’EEC, il avait en fin 2016 fait l’objet d’une cabale de la part de l’exécutif national, présidé par le Révérend Batomen, alors en fin de mandat. Pourtant, il avait été son directeur de campagne quelques année plus tôt. Dans la perspective des élections de 2017, C’est ainsi qu’il avait été traduit au Conseil de discipline pour des accusations fallacieuses, montées de toute pièce, simplement parce qu’il était partisan du respect du principe de rotation à la présidence de l’EEC. Malgré, le soutien de la quasi-totalité des paroissiens, il va écoper d’une suspension et de l’interdiction de se rendre aux Etats-Unis pour un rendez-vous médical. La communauté chrétienne de l’EEC était autant outrée qu’elle estimait que pendant ses 30 ans de carrière, il n’avait jamais fait l’objet d’une récrimination dans l’exercice de son sacerdoce pastoral.
Ce qui explique la chaleur qui lui a été réservée dès son arrivée dans l’enceinte de ce mythique sanctuaire de l’EEC, avant, pendant et à la fin l’office religieuse en français à laquelle il a pris part. « C’est une grande émotion qui m’anime, mais je voudrais d’abord rendre grâce à Dieu qui a rendu possible cette présence ici. Je voudrais dire merci, avec beaucoup de reconnaissances aux Révérends Georges Ngankou et Pauline Njoya, Pasteurs officiants, qui m’ont donné l’occasion de fouler à nouveau le sol de ce sanctuaire. C’est toujours une grande joie de fouler le sol de l’endroit où j’ai grandi, l’endroit où les grands missionnaires et grands pasteurs fondateurs de cette Eglise sont passés, la maison mère de l’Eglise Evangélique du Cameroun. Je suis heureux de retrouver les fidèles, les anciens, les visages que j’avais laissé, des personnes qui m’avaient accueilli ici quand j’étais responsable de cette chair. Les circonstances que vous connaissez très bien, m’ont donné d’explorer d’autres horizons », a déclaré le Rév. Justin Njikeu. Ce moment de retrouvaille qui a été réhaussé par la présence surprise du Gouverneur de la région du Littoral, Samuel Dieudonné Ivaha Diboua, a rassemblé 235 fidèles présents à ce culte de langue française dont il a tenue à la sortie à serrer chacun la main et échanger quelques souvenirs.
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Un moment de grandes émotions
Preuve que ce moment triste de sa vie est derrière lui. Surtout que ces crises pré-électorales et post-électorales avaient fini par plonger l’Eglise Evangélique du Cameroun dans un schisme qui a failli faire imploser cette religion pionnière du protestantisme au Cameroun. D’ailleurs, pour lui, il y voit en ces crises dont les séquelles affectent encore le bon fonctionnement de l’EEC quelque chose de positif. « La crise peut-être très positive et très utile, permettant aux uns et aux autres de prendre un nouveau départ. Je pense que les uns et les autres ont tiré de bonnes leçons de cette crise pour d’abord vivre leur foi, mais ensuite assumer leur responsabilité, faire l’œuvre que Dieu leur a confié. Parce que nous tenons notre ministère pas d’un homme, mais de Dieu qui nous juge, qui parfois nous fait passer par des voies difficiles pour éprouver notre foi », soutient-il. Et d’ajouter : « Les épreuves, Dieu parfois les permet et vous savez la promesse faite au peuple de Dieu de quitter l’Egypte, l’esclavage et aller à la Canaan ? La promesse n’était en fait que l’objet d’une conquête permanente. Il y a eu la guerre de Jéricho, la traversée de la mer rouge, il y a plusieurs autres combats que les chrétiens devraient mener pour avoir la victoire pour que la gloire revienne à Dieu seul ». Aujourd’hui, il profite de son exil pastoral pour entretenir à Silver Print en Pennsylvanie, une communauté chrétienne constituée à 99% des émigrés chrétiens camerounais issus de l’EEC. D’ailleurs, il en a profité pour adresser solennellement une invitation de cette communauté chrétienne au Rév. Georges Ngankou.
Ce dernier va dire la joie d’accueillir cet ainé et collègue qui était d’abord son Maître d’internat bien qu’étant en classe de terminale. « Nous étions très petits. Il nous a beaucoup encadré. Le retrouver comme Pasteur, ayant travaillé avec lui avant qu’il ne parte aux États-Unis, c’était vraiment émouvant. Il y a trop de joie dans le ciel quand les frères et sœurs se retrouvent », confie le Pasteur Georges Ngankou. Lui qui ne tarit pas de considération et de reconnaissance : « Nous sommes très heureux d’avoir avec nous ici, un ami, un grand frère, un papa. Dieu a permis que je passe par le Pasteur Njikeu Justin pour être ce que je suis ». Pour ce visiteur de prestige, tout porte à croire que ces turbulences ne l’ont pas ébranlé parce qu’il a fait la paix avec lui-même : « La paix, c’est d’abord dans le cœur. Dieu dit que chacun doit d’abord recevoir la paix dans son cœur. C’est toujours une grande joie de voir que malgré les vents, les tempêtes, les pluies,… En dépit de tout ce qui s’est passé, vous voyez, les hommes fidèles gardés la foi. Et c’est cela qui est essentiel », relativise-t-il. Et rappelle que l’évangile enseigne que la vie est faite de tribulations : « Le Seigneur ne nous a pas dit que la vie du chrétien sera un long fleuve tranquille. On passe toujours par les chemins rocailleux, glissant, difficiles, ... heureux ceux que le Seigneur trouvera veillant, combattant le bon combat de la foi ». Et pour lui, c’est depuis qu’il s’est réconcilié avec lui-même : « La réconciliation n’est pas seulement aujourd’hui. C’est tout le temps que les gens se réconcilient, s’embrassent, se disent bonjour et retrouvent la joie de vivre ».
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans le journal Le Canard Libéré du Cameroun
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