L’étau judiciaire international se resserre allégrement autour du président Samuel Eto’o
- Mathieu Nathanael NJOG
- 14 juil.
- 7 min de lecture
FECAFOOT
Scandale international de détournement des fonds liés aux matchs amicaux des Lions Indomptables du Cameroun : les Etats-Unis entrent en scène sous le regard préoccupé de la FIFA et de la CAF. Et déjà les premières repressaielles avec le visa d'entrée aux Etats-Unis refusé. Même la Commission éthique de la Fécafoot a fini par ouvrir la procédure judictionnelle à la suite de la plainte d'un membre du Comité Exécutif. Chaud dévant!

La vague de dénonciations sur la gestion des matches amicaux des Lions Indomptables en prélude à la Coupe du Monde, Qatar 2022, notamment contre la Russie avec en prime la circulation des documents administratifs et financiers confidentiels, faisant état des transferts de l’argent contractuel dans le compte privé du président de la FECAFOOT, logé soit au Qatar, soit au Bénin ne cesse de faire des vagues et mettre aux abois l’exécutif de la FECAFOOT qui a fini par faire une sortie sous fond de tentative de Kilav et d’intimidation de son Comité d’urgence ( constitué des vice-présidents) pour déclarer qu’il avait donné leur accord pour cette transaction. Ce qui pourrait tous leur incriminé. Supposant que c’était parce que les transferts de fonds entre la Russie et le reste du monde (notamment les pays sous le contrôle de l’OTAN) était difficile voire impossible. Mais aucune réponse n'a été donné pour rassurer l'opinion publique que les sommes incriminées ont été reversées dans le compte de la FECAFOOT. Motus et bouche cossue ! Un membre du Comité exécutif, Guibaï Gatama refusant de ses faire complice de cette forfaiture a traduit par devant la Commission d’éthique tous les responsables de la FECAFOOT (le président de la FECAFOOT, Samuel Eto’ Fils ; le Secrétaire général, Blaise Djounang et le Coordonnateur des Equipes nationales, Benoit Angbwa ; en fonction au moment des faits) qui étaient impliqués dans ces transactions. Au lieu de convoquer les accusés sur cette saisine, la Commission d’éthique avait plutôt convoqué Guibaï Gatama, le 17 juillet 2025 à la Chambre d’Instruction de cette Commission. Supposé pour complément d’enquête pourtant la plainte de Guibaï Gatama a été étoffé d’une thermocopie de tous les documents incriminés. Certains observateurs veulent y voir une première dans l'histoire du football camerounais, avec l’ouverture d’une procédure juridictionnelle sur une plainte contre un président de la FECAFOOT en fonction.
Dans la foulée, il s’en est suivi, une série de dénonciation identique, cette fois pour les matches amicaux disputés en terre Américaine contre l’Ouzbékistan et le Mexique. Pendant que les instances juridictionnelles et l’exécutif jouent au yoyo pour gagner du temps et que l’opinion publique est étonnée que ni la CAF ni la FIFA ne s’auto-saisissent de ces dénonciations dont les accusations portent sur une disposition de gouvernance de la Fifa qui interdit que l’argent destiné à une Fédération membre soit transféré dans un compte privé, auquel ce serait du détournement sans autre forme de procès, Washington est entré dans la danse. Ce qui était jusqu’ici perçu comme un scandale camerounais de plus autour de la gestion opaque de la Fédération Camerounaise de Football (FECAFOOT), sous Samuel Eto’o, est en train de franchir une nouvelle dimension, celle de la justice internationale, avec en première ligne les redoutables services d’investigation financières du Department of Justice (DOJ) des États-Unis. Notamment avec l’audition récente de Joe Kamga, Agent de match FIFA mandaté pour organiser le match Cameroun-Mexique. Cette procédure judiciaire américaine annonce un tournant potentiellement explosif. Selon des sources concordantes, c’est la Direction Criminelle du DOJ qui s’est saisie de l’affaire, avec l’appui du FBI et de l’IRS (Internal Revenue Service). Une configuration qui rappelle les grandes heures sombres du FIFAGate, le scandale mondial de corruption ayant fait tomber Sepp Blatter, Michel Platini et de nombreux dirigeants de fédérations internationales.

Vers un FECAFOOTgate
La justice américaine soupçonne que ces matches amicaux ont été utilisés comme toile de blanchiment international. En effet, entre 2021 et 2024, au moins quatre matchs amicaux internationaux des Lions Indomptables ont servi de prétexte à des supoosés détournements de fonds méthodiques, opérés sous la couverture de la FECAFOOT. À chaque fois, un schéma identique a été déployé. Les Fédérations partenaires règlent intégralement les frais de participation du Cameroun (hôtels, transports, primes,...). Mais l’argent destiné à la FECAFOOT est détourné vers des comptes privés, offshore ou personnels, appartenant à, ou contrôlés par Samuel Eto’o Fils en sa qualité de président de la Fécafoot. Or préalablement, la FECAFOOT a obtenu de l’Etat du Cameroun des fonds publics pour financer lesdits frais déjà pris en charge. Des documents qui ne sont toujours pas contestés, voire même dont l’authenticité est reconnue. Ils font état de ce que des comptes bancaires auraient été utilisés au Qatar, au Bénin, voire dans d'autres pays, rendant la traçabilité difficile. Ainsi, les fonds liés aux matchs contre le Mexique, la Corée du Sud, l’Ouzbékistan, ou encore la Russie, n’ont jamais atterri sur les comptes officiels de la FECAFOOT. Le match Cameroun-Mexique du 10 juin 2023 à San Diego aura été l’élément déclencheur de la tempête judiciaire. Ce jour-là, la Fédération mexicaine verse 600 000 dollars (environ 300 millions de FCFA) pour couvrir les frais de match. Ni les avocats impliqués aux États-Unis, ni l’Agent de match FIFA, Joe Kamga ne verront la couleur des paiements. L’argent, selon plusieurs sources et documents qui circulent, aurait été viré vers un compte personnel de Samuel Eto’o Fils au Qatar. C’est alors que le DOJ, ayant été saisi après des signalements anonymes, a ouvert une enquête pour fraude, blanchiment d’argent, et corruption transfrontalière, s’appuyant sur les jurisprudences précédentes du FIFAGate. L’IRS, bras fiscal du Gouvernement américain, s’intéresse notamment aux mouvements bancaires irréguliers opérés depuis ou vers les États-Unis.

Infantino et Motsépé sous pression
Le scandale place également Gianni Infantino (FIFA) et Patrice Motsépé (CAF) dans une posture très inconfortable. Pour l’instant, les deux dirigeants gardent le silence. Mais leur inaction devient de plus en plus intenable. Des voix s’élèvent au Cameroun et ailleurs pour demander à ces instances de publier les relevés de virements liés à la CAN 2021; CAN 2023, et à la Coupe du Monde 2022 dont les acteurs du football camerounais comme de coutume n’ont pas perçu les quotes-parts des retombées. Laissant planer que ces retombées financières aussi n’auraient pas été viré dans les comptes bancaires officiels de la FECAFOOT. Ce qui ne reste que des supputations. « Sachant que la FIFA ou la CAF ne peuvent pas virer ces retombées financières dans un compte privé, soit-il celui du président de la FECAFOOT. Car s’il s’avère que la FIFA et la CAF ont versé des fonds directement sur des comptes non officiels, sans contrôle ni vérification, leur responsabilité pourrait être engagée. Et cela serait une complicité de détournement comme le stipule les dispositions des règles de gouvernance de la FIFA », indique un expert américain de la finance du sport qui a requis l’anonymat.
En effet, depuis son arrivée à la tête de la FECAFOOT, Samuel Eto’o n’a cessé d’alimenter les rubriques de faits-divers des médias. Dès sa prise de fonction, il se susurre dans les pénates des anciens collaborateurs qui ont quitté le navire en pleine turbulence ou qui y ont été chassé qu’il aurait vidé les comptes bancaires de la Fédération sous prétexte qu’il devrait les sauvegarder d’une éventuelle saisie. Une « précaution », qui aurait convaincu les plus sceptiques du Comité Exécutif parce que son mandat avait démarré sous une avalanche de procédures judiciaires et des menaces d’annulation de leurs élections. Si elle était vraie, cette justification serait tout simplement révélatrice du niveau de malgouvernance dns laquelle la FECAFOOT est plongé depuis le 1er janvier 2022. Certains vont jusqu’à soutenir au grand jour que sa gestion est émaillée de : surfacturations, fausses factures, circuits parallèles, manipulations comptables, audits biaisés. Dans cet écosystème aux allures maffieuses, l’État camerounais a été floué. On évalue à plusieurs dizaines, voire centaines de millions de FCFA débloqués par le Trésor public qui auraient été détournés sur simple demande de la FECAFOOT, alors que les dépenses étaient déjà couvertes par les pays hôtes.

Le spectre du FIFAGate plane
La grogne des clubs des championnats Elite One et Elite Two pour décrier la non-distribution des subventions de l’Etat devant servir pour couvrir une partie des salaires de 22 joueurs et 03 encadreurs, l’absence de transparence sur les contrats des différentes sponsors de ces championnats et la non redistribution des quote-parts devant revenir aux clubs sur ses contrats de sponsoring et de namming (marquage des maillots par les logos des sponsors), la revendications des arriérés des indemnités de matches officiés par les arbitres de plusieurs saisons sportives,… viennent conforter les critiques sur le niveau du scandale financier dans lequel la FECAFOOT est empêtrée depuis le début de cette mandature.
Avec l’entrée en jeu du DOJ, du FBI et de l’IRS, le Cameroun est désormais au cœur d’un nouveau scandale global du football. La FECAFOOT pourrait faire l’objet de sanctions lourdes, voire de suspensions internationales. Des mandats d’arrêt internationaux ne sont pas à exclure si les preuves accumulées confirment les flux illicites de transferts d’argent. Et cette fois, Samuel Eto’o ne pourra certainement pas se cacher derrière son aura de star mondiale du football. L’ère du silence et de l’impunité semble toucher à sa fin. On indique déjà les premières represailles contre le président de la Fécafoot qui vient de se voir réfusé le visa d'entrée en terre Américaine pour assister à la finale de la Coupe du Monde des Clubs sur invitation de la FIFA « Dans une telle ambiance, Gianni Infantino et Patrice Motsépé doivent impérativement clarifier la traçabilité des fonds alloués au Cameroun pour les CAN 2021, CAN 2023 et la Coupe du Monde Qatar 2024. Sans quoi, ils seront jugés par l’opinion et par la justice comme complices actifs ou passifs d’un vaste système de détournement de fonds publics et sociaux », soutient un expert américain de la finance du sport. Il ne fait plus de doute qu’au moment où, l’on s’achemine vers la fin du mandat, en décembre 2025, le football camerounais vit l’une des pires crises de son histoire. Cette fois, ce ne sont plus les supporters ou les journalistes qui parlent. Ce sont les Procureurs américains. Et quand la justice américaine commence à fouiller, elle ne s’arrête pas.
De notre Correspondant en Californie aux Etats-Unis
Harris H.
Article publié dans le journal Le Canard Libéré du Cameroun
www.lecanardlibere237.com
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